Inglourious Basterds (2009) de Quentin Tarantino

6ème long métrage de Quentin Tarantino après "Reservoir Dogs" (1992), "Pulp Fiction" (1994), "Jackie Brown" (1997), "Kill Bill" (2003-2004 OUI il s'agit d'un seul et même film) et le Grindhouse "Boulevard de la Mort" (2007), ce projet est pourtant dans la tête du réalisateur-scénariste depuis "Pulp Fiction" mais il ne trouvait pas comment finir l'histoire. Il donc fallu une quinzaine d'années avant de pouvoir finaliser le scénario. Tarantino comme à son habitude s'inspire du cinéma bis et rend hommage au cinéma d'autrefois et cette fois il prend comme référence "Une Poignée de Salopards" en V.O. "The Inglorious Bastards" (1978) de Enzo G. Castellari qui s'inspirait lui même du fameux "Les 12 Salopards" (1967) de Robert Aldrich. Notons que si Tarantino reprend le titre en V.O. il ajoute volontairement deux fautes en clin d'oeil aux accents qui ont une importance certaine dans son récit. Précisons que le réalisateur allemand de "Cours, Lola, Cours" (1998) et "Le Parfum" (2006) Tom Tykwer a collaboré (mais non crédité) pour les passages en langue allemande. Le film est présenté au festival de Cannes où il reçoit un excellent accueil avec en prime un prix d'interprétation pour sa star allemande Christoph Waltz mais, surtout, contrairement aux habitudes de la plupart des réalisateurs après Cannes, Tarantino lui décide de rallonger son film de quelques scènes passant de 2h33 à 2h39. Sans aucun doute un bon choix puisque le film qui est alors largement le plus cher de Tarantino avec 70 millions de dollars mais reçoit un très bon accueil critique et public. Le film amasse 322 millions de dollars au box-office Monde dont 2,9 millions d'entrées France. Film interdit au moins de 12 ans... 1940 en France occupée, des nazis menés par l'officier "Chasseur de juifs" Hans Landa massacrent une famille dans une ferme isolée dont Shosanna Dreyfus arrive à fuir. Un peu plus tard, le lieutenant américain Aldo Raine dit Aldo l'Apache forme un groupe de soldats juifs pour traquer et tuer des nazis à travers l'Europe. 1944, Shosanna est devenue Emmanuelle Mimieux et gère un cinéma, mais elle est contrainte d'organiser une première 100% allemande après qu'un héros de guerre soit tombé sous son charme. Une rencontre qui va tout de même lui permettre d'avoir une opportunité de tuer Hans Landa et la haute sphère nazie réunie dans son cinéma. Entre temps les "Inglourious Basterds" sont missionnés pour organiser un attentat dans le cinéma, une chance inouïe de couper la tête du IIIème Reich... 

Au casting, les "Bâtards" sont menés par la star Brad Pitt qui retrouve Tarantino après ses débuts où il est apparu dans "True Romance" (1993) de Tony Scott écrit par Tarantino qu'il retrouvera des années plus tard également dans "Once Upon a Time... in Hollywood" (2019), il retrouvera la Seconde Guerre Mondiale dans "Fury" (2014) de David Ayer et "Alliés" (2016) de Robert Zemeckis. Parmi la troupe citons Eli Roth qui retrouve également le réalisateur après "Boulevard de la Mort" (2007) et qui est aussi réalisateur notamment des films d'horreur "Hostel" (2005-2007), Til Schweiger vu entre autre dans "Baron Rouge" (2008) de Nikolai Müllerschön ou "Far Cry" (2008) de Uwe Boll, Gedeon Burkhard surtout vu dans des séries TV comme "Soko Brigade des Stups" (1996) ou "Alerte Cobra" (2007-2008), B.J. Novak apparu dans la comédie "En Cloque, Mode d'Emploi" (2007) de Judd Apatow, Omar Doom vu chez Tarantino entre "Boulevard de la Mort" (2007) et  "Once Upon a Time... in Hollywood" (2019), Samm Levine aperçu dans "Pulse" (2006) de Jim Sonzero et "I Love You, Beth Cooper" (2009) de Chris Columbus après lequelil retrouve aussi Paul Rust aperçu dans "Semi-Pro" (2008) de Kent Alterman. Pour la famille française Lapadite citons Mélanie Laurent remarquée alors dans "Embrassez qui vous voudrez" (2002) de et avec Michel Blanc ou "Dikkenek" (2006) de Olivier Van Hoofstadt et retrouvera dans son propre film "Les Adoptés" (2011) son partenaire Denis Ménochet qui retrouvera aussi dans "Robin des Bois" (2010) de Ridley Scott et "Grand Central" (2013) de Rebecca Zlotowski l'actrice Léa Seydoux qui retrouveras de son côté dans "Spectre" (2015) et "Mourir Peut Attendre" (2021) ainsi que dans "The French Dispatch" (2021) de Wes Anderson l'acteur allemand Christoph Waltz apparu notamment dans "Ordinary Decent Criminal" (2000) de Thaddeus O'Sullivan ou "Le Coup de Feu" (2003) de Dito Tsintsadze et retrouvera Tarantino pour "Django Unchained" (2012). Parmi les autres nazis citons Daniel Brühl qui retrouve après "Parfum d'Absinthe" (2004) de Achim Von Borries l'actrice Jana Pallaska et l'acteur August Diehl qui retrouvera plus tard Brad Pitt dans "Alliés" (2016) et Léa Seydoux dans "Kursk" (2018) de Thomas Vinterberg, puis Sylvester Groth qui avait déjà incarné Joseph Goebbels dans "Mon Führer : la Vraie Véritable Histoire d'Adolf Hitler" (2007) de Dani Levi, Martin Wuttke remarqué dans "Les Trois Vies de Rita Vogt" (2000) de Volker Schlöndorff, Ludger Pistor vu dans "La Liste de Schindler" (1993) de Steven Spielberg et "Lola, Cours, Lola" (1998) et retrouve après "Casino Royale" (2006) de Martin Campbell son partenaire Richard Sammel qui qui retrouve la même période après "La Vie est Belle" (1998) de et avec Roberto Begnini et "Laissez-Passer" (2002) de Bertrand Tavernier dans lequel jouait aussi Christian Berkel qui retrouve également l'uniforme gris après "Black Book" (2006) de Paul Verhoeven et "Walkyrie" (2008) de Bryan Singer. Puis citons ensuite Michael Fassbender remarqué dans "Hunger" (2008) de Steve McQueen ou "Fish Tank" (2009) de Andrea Arnold et qui retrouvera dans "Assassin's Creed" (2016) de Justin Kurzel l'acteur français Denis Ménochet qui lui-même retrouvera dans "Forces Spéciales" (2011) de Stéphane Rybojad l'actrice franco-allemande Diane Kruger qui retrouve Daniel Brühl après "Joyeux Noël" (2005) de Christian Carion, puis plus tard Léa Seydoux dans "Les Adieu à la Reine" (2012) de Benoît Jacquot. Citons enfin André Penvern apparu dans "Le Pacte des Loups" (2001) de Christophe Gans ou "Les Hauts Murs" (2008) de Christian Faure, Julie Dreyfus remarquée en Sofia Fatale dans "Kill Bill" (2003-2004), Alexander Fehling aperçu dans "Et puis les Touristes" (2007) de Robert Thalheim ou "The Captain - l'Usurpateur" (2017) de Robert Schwentke. On notera encore les courtes apparitions et les caméos de Mike Myers, Rod Taylor dont c'est le dernier rôle pour la star de "L'Arbre de Vie" (1957) de Edward Dmytryk ou "Les Oiseaux" (1963) de Alfred Hitchcock, Samuel L. Jackson en narrateur, Harvey Keitel en vocal à la radio, Tarantino lui-même et surtout le réalisateur Enzo G. Castellari en général nazi et son acteur Bo Svenson en officier américain dans le film dans le film en caméo hommage pour les deux maîtres d'oeuvre du film original en V.O. "The Inglorious Bastards" (1978)... 

Le film est chapitré, comme aime le faire Tarantino, avec un scénario qui est cette fois linéaire contrairement à "Kill Bill" par exemple. La première partie intitulée "Il était une fois une France occupée par les nazis", ouvre remarquablement le film, où comment on fait connaissance avec le chasseur de juifs Hans Landa qui devient aussitôt un personnage culte incarné par Christoph Waltz jusque là plutôt obscur acteur allemand qui offre une performance aussi habitée que singulière. La façon dont il manipule le père Lapadite/Ménochet avec un phrasé unique et une courtoisie aussi séductrice que vénéneuse entre d'emblée dans les annales du cinéma. Le chapitre 2 où "Inglourious Basterds" nous présente les "10 salopards" mené par Aldo Raine (clin d'oeil à l'acteur Aldo Ray véritable héros de 39-45) dit Aldo l'Apache interprété de façon savoureuse par un Brad Pitt aux anges. La scène où l'Ours Juif alias Eli Roth arrive par un tunnel d'où on ne perçoit que le son d'une batte de baseball contre les parois fait froid laisse un petit frisson dans le dos, tandis que les scalps montrent que Tarantino va aller loin dans la violence mais la scène qui va marquer est une histoire de tatouage qui va même ébranler le Führer ! Le chapitre 3 titré "Une soirée allemande à Paris" permet de retrouver Shosanna/Laurent quatre ans après le massacre de la partie 1. Devenue gérante d'un petit cinéma elle se voit contrainte d'organiser une première 100% nazie ce qui va lui donner une idée brûlante. Quand elle croise Landa la tension est à son comble, mais la mégalomanie démente de Goebbels/Groth fait aussi froid dans le dos tandis qu'on adore l'insolence toute mesurée de Shosanna. Le chapitre 4 est l"Opération Kino" (kino signifie ciné), où les Basterds de Aldo l'Apache organise une réunion avec une allemande alliée et un officier anglais dans une cave où la présence nazie n'était pas prévue. L'intervention du nazie Hellstrom/Diehl est aussi odieuse qu'insidieuse jusqu'à une conclusion à l'issue incertaine. Puis enfin le chapitre final pour une "Vengeance en très gros plan" où Shosanna/Laurent va s'offrir la vengeance ultime en devançant presque les Basterds qui vont offrir le plus jouissif des tatouages.

Tarantino signe un film de guerre uchronique aussi fun que sanglant, aussi tragique que jouissif car une chose est sûre, qui n'a jamais imaginé l'Histoire du monde différemment en se disant "si seulement un attentat contre Hitler avait réussi !" Le postulat de départ est une promesse et le réalisateur-scénariste l'a tenue avec l'art et la manière. Rien n'est laissé au hasard, par exemple la présence et le choix de faire de Goebbels un personnage aussi central permet aussi de faire un film dans le film, "La Fierté de la Nation" ersatz parfait de la propagande nazie selon Goebbels ; précisons que ce mini film en Noir et Blanc a été tourné par son acteur et ami Eli Roth. Comme toujours chez Tarantino le film est parsemé de clins d'oeil et de références au cinéma, celui des autres comme Aldo Ray, où le sergent Stiglitz vis à vis de l'acteur mexicain Hugo Stiglitz, mais on peut aussi rappeler que l'officier anglais Archie Hicox/Fassbender serait un descendant de Pete Hicox alias Tim Roth dans le futur "Les Huits Salopards" (2015) de Tarantino, ou que Aldo Raine/Pitt serait l'arrière grand-père de Floyd dans "True Romance" joué aussi par Brad Pitt ! Le producteur Donowitz/Rubinek dans "True Romance" serait également le fils de Donowitz "L'Ours Juif" alias Eli Roth. Le film est un nouveau puzzle dense et passionné dans une construction narrative comme 5 courts métrages mais qui sont reliés par un fil conducteur lui-même ténu entre Shosanna et Landa. Un grand film à voir et revoir à volonté.

Note :