Rapaces (2025) de Peter Dourountzis
Après "Vaurien" (2020) voici le nouveau long métrage de Peter Dourountzis dont le scénario lui a été proposé par son auteur Christophe Cantoni et concerne le terrible faits divers de l'affaire Elodie Kulik (Tout savoir ICI !) mais vu du point de vue d'un enquêteur du fameux magazine Détective, magazine mi-investigation mi-sensationnel mais sur lequel le cinéaste précise : "Lorsque vous imaginez un détective de cinéma ou de roman, il y a de fortes chances pour que vos repensiez à Philip Marlowe, Mike Hammer ou Sam Spade. Du début des années 30 à la fin des années 70, ces héros américains ont formaté la figure de l'enquêteur solitaire. Pourtant, l'un des détectives les plus captivants est né en 1928 et il est français. Henri La barthe l'a imaginé de toutes pièces, et son détective à lui n'est pas un homme mais un journal. A son heure de gloire, Détective tirait à 400000 exemplaires par semaine ! Dès le départ, il opta pour un langage hautement littéraire, choisissant ses rédacteurs parmi l'élite de son temps : Simenon, Morand, Dijan, Mauriac, Cocteau, Albert Londres lui-même. Mais aussi Joseph Kessel, dont le frère Georges dirigeait l'hedomadaire. A ceux-là s'ajoutent les financeurs Gaston et Raymond Gallimard, à qui le succès de Détective permit d'acquérir une indépendance financière." Pourtant fasciné par l'univers du magazine Détective, Peter Dourountzis rejette le scénario originel tel qu'il est et impose une intrigue toujours inspiré du faits divers mais de façon moins fidèle et plus libre. Le réalisateur-scénariste réécrit ainsi une grande partie du scénario avec Christophe Cousin auteur des films "Passer l'Hiver" (2013) de Aurélia Barbet et du sien "2 Temps, 3 Mouvements" (2015), puis avec Fabianny Deschamps réalisatrice des films "New Territories" (2014), "Isola" (2016) et "Le Bal des Gopi" (2022)...
Samuel est enquêteur pour le magazine Détective. Alors qu'il débute une mission sur le meurtre affreux d'une jeune fille il accueille sa propre fille comme stagiaire. Frapper par la brutalité de ce meurtre, pensant évidemment à sa propre fille, elle-même s'y impliquant plus que de mesure, Samuel va enquêter plus profondément à l'insu de sa rédaction... L'enquêteur-journaliste est incarné par Sami Bouajila vu récemment dans "The Crow" (2024) de Rupert Sanders et dans un autre thriller de faits divers "Six Jours" (2025) de Juan Carlos Medina, tandis que sa fille est jouée par Mallory Wanecque remarquée dans "Les Pires" (2022) de Lise Akoka et Romane Guéret, vue dans "Pas de Vagues" (2024) de Teddy Lussi-Modeste et surtout révélation de "L'Amour Ouf" (2024) de Gilles Lellouche. Citons autour d'eux Jean-Pierre Darroussin vu dans "Juliette au Printemps" (2024) de Blandine Lenoir et "La Pie Voleuse" (2024) de Robert Guédiguian, Valérie Donzelli vue récemment dans "Les Musiciens" (2025) de Grégory Magne et retrouve après "Making Of" (2023) de Cédric Khan son partenaire Stefan Crepon vu dans "Drone" (2024) de Simon Bouisson et "Jouer avec le Feu" (2024) des soeurs Coulin, Andrea Bescond vue entre autre dans ses propres films co-signés avec Eric Métayer "Les Chatouilles" (2018) et "Quand tu seras Grand" (2023), Gilles Cohen vu dans "Vaincre ou Mourir" (2023) de Paul Mignot et Vincent Mottez et "La Syndicaliste" (2023) de Jean-Paul Salomé et retrouve Sami Bouajila après "Six Jours" (2024), Samuel Jouy vu entre autre dans "Le Lion" (2020) de Ludovic Colbeau-Justin et "Flo" (2023) de Géraldine Danon, Paul Hamy vu dernièrement dans "Rien ni Personne" (2024) de Gallien Guibert et "Le Mangeur d'Âmes" (2024) de Julien Maury et Alexandre Bustillo, puis enfin Matthieu Lucci remarqué dans "Selon la Police" (2020) de Frédéric Videau ou "La Fille d'Albino Rodrigue" (2023) de Christine Dory... Le film a un premier soucis, cet hommage au journalisme selon "Le Nouveau Détective" frôle le mauvais goût, sorte de "Voici" des faits divers qui certe raconte des histoires vraies mais en en faisant des tonnes, rajoutant du pathos inutile, du sensationnalisme et surtout via des moyens et/ou méthodes souvent immoraux comme le film le montre d'ailleurs au début du film, des méthodes abjectes dignes de "Rapaces" justement, qui n'ont rien à envier aux charognards des Voici et autres magazines people. Par là même, on rirait presque quand le journaliste/Bouajila ose déclarer que "nous mettons notre nez là où la police n'ose pas y mettre la main" ! Oui, peut-être mais justement parce que la police suit la loi, alors que l'"enquêteur rapaces" est prêt à tout pour un scoop même à risquer l'intégrité de sa propre fille.
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Ainsi l'empathie pour ce "journaliste-enquêteur" est plus que limité, sauvé surtout par sa fille/Wanecque qui cherche à se rapprocher de son père, puis qui reste d'une lucidité effrayante quant à son pouvoir de séduction ; sa description du passage de l'enfant à femme frappe les esprits et crée même un certain malaise. Dans le style on pense un peu à l'excellent "La Nuit du 12" (2022) de Dominik Moll, toute proportion gardée la faute surtout à la dimension socialo-moralisatrice. On arrive alors au second soucis, où comment un groupuscule masculiniste est forcément des abrutis de redneks franchouillards qui semblent donc également suprémacistes blancs, ça tombe bien l'enquêteur est d'origine maghrébine, ce qui donne un message ou propos à contre-courant de ce que la grande majorité des faits divers du genre raconte. Le film est donc trop manichéen, sans subtilité sur le fond. Dommage, car sur la forme Peter Dourountzis impose une atmosphère glauque à souhait, avec surtout quelques passages sous forte tension comme la traque dans la nuit en voiture-cibi, et surtout le dîner au restaurant routier. Si on peut occulter le message politique militant légèrement nauséabond le film reste un thriller sombre et réaliste à conseiller. Note indulgente.
Note :