Many Saints of Newark - une Histoire des Soprano (2021) de Alan Taylor
Sans surprise voici une nouvelle transposition d'une série TV au grand écran. Si on connaît les franchises "Star Trek" ou "Mission Impossible" qui sont des reboots, cette fois cela n'a rien à voir puisque le film se veut dans la lignée créatrice de la série originale, et dans une logique chronologique cohérente. On est donc loin, pour l'exemple, de la modernisation façon "Agents Très Spéciaux - code U.N.C.L.E." (2015) de Guy Ritchie mais plus proche dans l'idée d'un "Downton Abbey" (2018) de Michael Engler. Pour ce passage vers les salles obscures c'est un producteur de la série TV originelle "Les Sopranos" (1999-2007) qui a proposé ce projet au créateur David Chase qui a accepté et s'est ensuite très investi sur le tournage en conseillant particulièrement les membres de l'équipe pour qu'une cohérence certaine existe entre la série et le film. Pour se faire il est choisi plutôt un prequel pour revenir sur les origines de la saga et sur l'adolescence de Tony Soprano, héros de la série qui était incarné par James Gandolfini (mort en 2013). Le scénario est signé de David Chase en collaboration avec Lawrence Konner, scénariste expérimenté et polyvalent auquel on doit des films aussi divers que "Le Diamant du Nil" (1986) de Lewis Teague à "L'Apprenti Sorcier" (2010) de Jon Turtletaub en passant par "La Maison des Otages" (1991) de Michael Cimino, "La Planète des Singes" (2001) de Tim Burton ou encore "Le Sourire de Mona Lisa" (2004) de Mike Newell. La réalisation est confiée à Alan Taylor, passé par la télévision en réalisant pour de nombreuses séries comme "Homicide" (1993-1999), "Sex and the City" (1999-2003), et surtout quelques épisodes pour "Les Soprano" puis "Game of Thrones" (2011-2012-2017) avant de se lancer lui aussi au cinéma en moins probant avec les blockbusters "Thor : le Monde des Ténèbres" (2013) et "Terminator : Genisys" (2015)... 1967, Tony Soprano est un ado dont la famille vit de crimes organisés. Il adule son oncle Richard "Dickie" Moltisanti même si il ne sait pas tout de lui et rêve de suivre ses traces. Mais sa mère comme son oncle aimerait sans doute qu'il tente une autre carrière surtout après avoir passé des examens prometteurs. Alors que le jeune Tony cherche sa place, les relations intra-familiales sont tendues pas aidées par les émeutes raciales...
On retrouve quelques protagonistes de la série mais logiquement interprétés par d'autres acteurs, en premier lieu évidemment Tony Soprano cette fois incarné par Michael Gandolfini, soit le fils du père qui reprend le flambeau dans un rôle important après être apparu dans la série TV "The Deuce" (2018-2019), les films "Ocean's 8" (2018) de Gary Ross et "Cherry" (2021) des frères Russo. Les autres personnages vus dans la série qui sont ici forcément plus jeunes citons les acteurs Vera Farmiga célèbre Lorraine Warren dans la saga des "Conjuring", Billy Magnussen vu dans "Aladdin" (2019) de Guy Ritchie et "Mourir peut Attendre" (2021) de Cary Joji Fukunaga, Corey Stoll vu dans "First Man" (2018) de Damien Chazelle et "West Side Story" (2021) de Steven Spielberg, puis d'autres personnages sont de retour joués par John Magaro, Lauren DiMario ou Michael Imperioli qui est la voix du narrateur Christopher Moltisanti seul et unique membre du casting à reprendre donc son rôle. Parmi les nouveaux venus donc l'oncle "Dickie" est incarné par Alessandro Nivola culte Pollux Troy dans "Volte/Face" (1997) de John Woo et vu depuis dans "A Most Violent Year" (2014) de J.C. Chandor, "Désobéissance" (2017) de Sebastian Lelio ou "A Beautiful Day" (2017) de Lynne Ramsay. Le papa de ce dernier et "parrain" est joué par Ray Liotta, qui se retrouve dans le film alors qu'il était envisagé comme Tony Soprano lors du lancement de la série fin des années 90, il faut dire qu'il a la gueule de l'emploi depuis "Les Affranchis" (1990) de Martin Scorcese en passant ensuite dans "Blow" (2001) de Ted Demme, "Cogan, la Mort en Douce" (2012) de Andrew Dominik ou plus récemment dans "No Sudden Move" (2021) de Steven Soderbergh. Enfin citons Jon Bernthal qui connaît là sans doute son année la plus faste après "Ceux qui Veulent ma Mort" (2021) de Taylor Sheridan, "La Méthode Williams" (2021) de Reinaldo Marcus Green et "Impardonnable" (2021) de Nora Fingscheidt, puis Leslie Odom Jr. vu dans "Harriet" (2019) de Kasi Lemmons et "One Night in Miami" (2021) de Regina King... Vu le succès de la série TV originelle le risque financier pour ce projet est limité, la fan base paraît assez importante pour assurer à minima le succès de ce projet. Néanmoins certains choix paraissent peut-être risqué, ou du moins interrogé les spectateurs. D'abord le choix de retrouver Tony alors ado et dans un rôle finalement assez secondaire et peu intéressant, la lutte fratricide des adultes étant largement plus prenante. Le choix d'offrir lez rôle du Tony jeune au fils du défunt james Gandolfini aurait pu être un bon choix, ressemblance physique, hommage clin d'oeil mais le jeune acteur est sans charisme pour ne pas dire effacé et sans nuance.
Et encore, indulgence oblige, ça va tant sno rôle est accessoire. D'ailleurs, pour l'anecdote, le jeune Michael Gondolfini a avoué : "J'ai beaucoup travaillé sa respiration - cette manière légendaire qu'avait mon père de respirer. Et j'ai aussi travaillé la manière qu'il avait de se toucher constamment le visage." Dans le même temps il semble pourtant que ses ardeurs aient été calmé par Alant Taylor et David Chase qui "on exhorté le comédien à oublier sa performance de son père pour se concentrer sur sa propre version de Tony, qui n'était pas encore un redoutable parrain de la mafia à cette époque." Laissons chacun constater la performance. Il n'en demeure pas moins que le film se fait un peu sans lui, ce qui fait penser que le choix aurait dû plutôt se porter à la période où Tony est jeune adulte et gagne sa place ; mais la fin du film nous titille un peu et un nouveau film ne serait peut-être pas à exclure ! La meilleure idée du film est de placer le récit lors de cet été 1967 lors des émeutes de Newark (Tout savoir ICI !), et qui fait donc écho au 7ème épisode de la série "Down Neck" dans lequel Livia Soprano, la maman de Tony jouée dans ce film par Vera Farmiga, regarde justement les émeutes en direct à la télévision lors d'un flash-back. Outre la portée politico-socia-raciale de ces émeutes elles permettent de tisser des relations avec une autre communauté via le crime et les ambitions et donne une autre dimension à la fresque. Le plus gros défaut du film est sans doute aussi sa plus grande qualité : on a simplement l'impression de voir une épisode de série façon épisode spéciale. La mise en scène à l'exception de quelques passages restent trop terne, trop en retrait, il manque au film un peu de flamboyance, un peu de panache ou même un peu de tension. L'intrigue est prenante, solide et intelligemment mise en place mais à l'image on s'ennuie un peu. Par contre, sans compter le jeune Tony, excellent casting, dans une reconstitution soignée sans trop jouer la carte "film historique", avec quelques séquences marquantes. En conclusion un film qui n'était pas nécessaire mais qui fait le job tranquillement alors qu'il aurait justement fallu un peu d'audace.
Note :