Bernadette (2023) de Léa Domenach
Premier long métrage de Léa Domenach, fille du journaliste politique Nicolas Domenach spécialiste de Jacques Chirac ce qui explique déjà un intérêt précoce, et une image assez négative de Madame Bernadette Chirac (Tout savoir ICI !). Mais un jour elle découvre le documentaire "Bernadette Chirac, Mémoire d'une Femme Libre" (2016) de Anne Barrère qui était sa conseillère en communication : "J'ai été surprise par sa liberté de parole, elle qui avait alors 80 ans... Je l'ai découverte drôle et affranchie, très loin de l'idée que je pouvais m'en faire et surtout avec un parcours qui méritait d'être raconté." Léa Domenach avoue aussi une volonté de passer un message politique à plusieurs niveaux comme offrir un rôle de femme de plus de 50 ans (qui ne concerne que 7% des rôles) ou de montrer qu'il existe aussi plusieurs féminisme comme elle le précise : "Bernadette Chirac a fini par affirmer un certain féminisme, qui n'est pas le même que le mien, mais je voulais que mon film parle ) plusieurs générations et qu'il soit le plus grand public possible. Bernadette, c'est le point de vue d'une femme sur une histoire que tout le monde connaît, c'est une façon de regarder la grande histoire par la petite." La réalisatrice-scénariste co-écrit son scénario avec Clémentine Dargent autrice pour les séries TV "Têtards" (2019-2020) et "OVNI(s)" (2021-2022). Vu le sujet, il y a forcément la question de la famille Chirac que Léa Domenach n'a pas contacté car elle voulait rester libre dans son écriture : "J'espère que la famille Chirac ira voir le film et que cet hommage à Bernadette Chirac lui plaira." Malheureusement, la fille du couple présidentiel, Claude Chirac a fait part dès 2022 de son agacement vis à vis du projet de film, et a critiqué le fait que sa famille n'a pas été consultée... 1995, Jacques Chirac devient Président de la République. Devenue première Dame de France, quand elle arrive à l'Elysée Bernadette Chirac s'attend enfin à obtenir la place qu'elle mérite après avoir oeuvrée dans l'ombre pour soutenir son époux dans son parcours politique. Mais elle s'aperçoit qu'elle est mise de côté, qu'elle n'est pas appréciée, elle décide alors de prendre sa revanche et de gagner sa place dans le paysage médiatique...
Le rôle titre est tenu par la star Catherine Deneuve vue récemment dans "De son Vivant" (2021) de Emmanuelle Bercot et "Habib la Grande Aventure" (2023) de Benoît Mariage, qui se retrouve aussi dans un rôle pas si éloigné que le sien dans "Potiche" (2010) de François Ozon, elle retrouve son "mari" Jacques Chirac joué par Michel Vuillermoz après les films "Palais Royal !" (2005) de et avec Valérie Lemercier et "Bancs Publics (Versailles Rive-Droite)" (2009) de Bruno Podalydès, deux films après lesquels ils retrouvent aussi leur partenaire Denis Podalydès (16ème film avec Vuillermoz !) qui retrouve une histoire qu'il a déjà plus ou abordé puisqu'il a incarné Nicolas Sarkozy dans "La Conquête" (2011) de Xavier Durringer et qu'il a déjà été conseiller pour "Présidents" (2021) de Anne Fontaine. Les filles Chirac sont interprétées par Sara Giraudeau vue dernièrement dans "La Page Blanche" (2022) de Murielle Magellan et "Le Sixième Enfant" (2022) de Léopold Legrand, puis Maud Wyler vue dans "Sur la Branche" (2023) de Marie Garel-Weiss ou "La Petite" (2023) de Guillaume Nicloux. Le personnage de Nicolas Sarkozy est cette fois incarné par laurent Stocker qui retrouve son ami Denis Podalydès après "La Grande Magie" (2023) de Noémie Lvovsky, tandis que François Vincentelli alias Dominique De Villepin retrouve également Denis Podalydès après "La Belle Epoque" (2019) de et avec Nicolas Bedos. Citons encore Lionel Abelanski vu récemment dans "Plancha" (2023) de Eric Lavaine et "Les Petites Victoires" (2023) de Mélanie Auffret, Stephane Boucher vu dans "Eiffel" (2021) de Martin Bourboulon ou "L'Etau de Munich" (2022) de Christian Schowchow, Scali Delpeyrat qui s'est focalisé sur la télévision et le théâtre depuis son dernier long métrage de cinéma "Curiosa" (2019) de Lou Jeunet, Jacky Nercessian qui retrouve Sara Giraudeau après "Le Sixième Enfant" (2022) et vu dernièrement dans "Les Vengeances de Maître Poutifard" (2023) de Pierre-François Martin-Laval, et enfin n'oublions pas un certain David Douillet incarné par le comique Artus omniprésent cette année avec entre autre "Apaches" (2023) de Romain Quirot, "Un Homme Heureux" (2023) de Tristan Séguéla et "Veuillez nous Excuser pour la Gêne Occasionnée" (2023) de Olivier Van Hoofstadt... Le film se focalise sur les années de présidence de Chirac, soit entre 1995 et 2007, et force est de constater que la grande partie du film repose bel et bien sur des faits avérés. Ainsi les grandes lignes, les grandes dates, les grands événements mais aussi certains dialogues ou répliques, et les faits relationnels entre Madame Chirac et les autres peuvent tous être siglés "histoire vraie". Une dimension accentuée aussi par l'utilisation d'archives plus ou moins remaniées.
La chose la plus fictive est en fait Bernadette Chirac elle-même, clairement trop "vertueuse" et trop "gentille" pour être crédible d'un point de vue historique et de façon factuelle, comme le souligne d'ailleurs la réalisatrice : "Nous avons volontairement adouci son caractère. Elle est sûrement plus "dure" que ce que nous montrons dans le film. Nous n'avons pas cherché à cacher cette réalité ou à faire un portrait hagiographique, mais nous voulions un vrai personnage de fiction, de comédie." On pense dans le genre au récent et très réussi "Le Tigre et le Président" (2022) de Jean-Marc Peyrefitte, où comment rendre drôle des faits historiques, créer un décalage sans pour autant réécrire l'Histoire. Et pour commencer il faut saluer le casting avec un Chirac plus vrai que nature (Vuillermoz épatant), et une Bernadette idéale avec la Reine du cinéma français, on sera moins convaincu par Sarkozy/Stocker (trop dans l'imitation) et par un Lagerfeld quasi superflu. Mais le scénario est aussi simple qu'efficace, restant focus sur quelques dates clefs comme autant de segments qui montrent et rappellent que derrière chaque grand homme il y a une femme. Et si Bernadette Chirac n'était pas un ange le film lui rend un hommage mérité si on regarde par l'oeilleton sa relation complexe et ingrate avec son époux. On notera aussi la jolie idée (si on reste tolérant !) du choeur, raccord avec la foi de l'héroïne du film, et qui ajoute à la dérision ambiante. Le film aurait pu être encore plus drôle et plus caustique, mais la comédie décalée fonctionne bien aussi, et il était difficile d'occulter quelques passages (leur fille Laurence entre autre...). En conclusion une comédie amusante certe sans doute un peu trop complaisante mais on rit un peu et on sourit beaucoup ce qui est déjà beaucoup.
Note :