Le Déluge (2024) de Gianluca Jodice

par Selenie  -  1 Janvier 2025, 15:47  -  #Critiques de films

Après son premier long métrage "Le Poète et le Dictateur" (2020), le réalisateur italien Gianluca Jodice se lance dans un film historique ancré dans la grande Histoire de France, et pas des moindres, après avoir "lu, par hasard, un livre sur le procès de Louis XVI, et j'ai eu l'idée de raconter la dernière nuit du dernier grand roi. (...) il y a un juste milieu, une époque dont personne n'a jamais parlé : les quelques mois au cours desquels les derniers roi et reine de France avec leurs deux enfants - Marie-Thérèse et Louis-Charles - furent incarcérés dans un château noir aux portes de Paris, en attendant d'être exécuté". Ainsi le cinéaste veut-il se focaliser sur les tous derniers mois à la Prison du Temple avec la fin de Louis XVI (tout savoir ICI !) et la fin de Marie-Antoinette (tout savoir ICI !). Le réalisateur-scénariste co-signe son scénario avec Flippo Gravino qui a signé auparavant les films "Une Vie Tranquille" (2011) et "Alaska" (2016) tous deux de Claudio Cupellini, "Ali a les Yeux Bleus" (2014) et "Fiore" (2017) tous deux de Claudio Giovannesi, mais aussi "Romulus et Rémus" (2020) de Matteo Rovere, et connu pour les séries TV "Gomorra" (2014) et "Romulus" (2020). D'ailleurs à la production on notera les noms de Matteo Rovere qui a déjà produit des films français avec "France" (2021) de Bruno Dumont et surtout "Onoda, 10000 Nuits dans la Jungle" (2021) de Arthur Harari, et Paolo Sorrentino famux réalisateur de quelques bijoux comme "Il Divo" (2008), "La Grande Bellezza" (2013) ou "Youth" (2015). Les deux scénaristes se sont inspirés des carnets de Cléry, valet de chambre du Roi et resté auprès de lui jusqu'à la mort. Les films sur la Révolution Française sont légion, mais il est vrai que les derniers mois du couple royal reste confidentiel. Citons pour l'ensemble la fresque "La Révolution Française" (1989) de Robert Enrico, et pour des instants plus précis citons "La Nuit de Varennes" (1982) de Ettore Scola et "Les Adieux à la Reine" (2012) de Benoît Jacquot qui relatent des faits précédents "Le Déluge"... 

Dans les tourments de la Révolution Française, le destin du Roi Louis XVI et de la Reine Marie-Antoinette du mois d'août 1792 à leur exécution, et le quotidien de la famille royale à la Prison du Temple en attendant la mort promise... Le couple royal est incarné par Guillaume Canet vu entre autre dans "Acide" (2023) de Just Philippot et "Un Coup de Dés" (2023) de et avec Yvan Attal, puis Mélanie Laurent vue surtout dans ses propres films "Le Bal des Folles" (2021) et "Voleuses" (2023). Leurs deux enfants sont joués par Anouk Darwin Homewood aperçue dans "La Nonne : la Malédiction de Sainte-Lucie" (2023) de Michael Chaves, et Vidal Arzoni apparu dans "Les Femmes du Square" (2022) de Julien Rambaldi. Le fameux Cléry est interprété par Fabrizio Rongione qui retrouve Matteo Rovere après "Romulus et Rémus" (2019) et bu plus récemment dans "L'Evénement" (2021) de Audrey Diwan et "Amal : un Esprit Libre" (2023) de Jawad Rhalib. Citons ensuite Roxane Duran qui traverse encore l'Histoire après "Le Ruban Blanc" (2009) de Michael Haneke ou "Michael Kohlhaas" (2013) de Arnaud des Pallières et retrouve Mélanie Laurent après son film "Respire" (2014), Aurore Broutin aperçue dans "Les Cadors" (2023) de Julien Guetta et "Ma France à Moi" (2023) de Benoît Cohen, Hugo Dillon qui retrouve Guillaume Canet après "Rock'n Roll" (2016) de lui-même et le récent "Hors-Saison" (2024) de Stephane Brizé et vu entre temps dans "Les Frères Sisters" (2018) de Jacques Audiard ou "Le Principal" (2023) de Chad Chenouga, et enfin Tom Hudson apparu récemment dans "Spencer" (2022) de Pablo Larrain et "DogMan" (2023) de Luc Besson... Le film se déroule de septembre 1792 à janvier 1793, et si le récit raconte le quotidien et l'intimité de la famille royale c'est bel et bien Louis XVI qui reste le fil conducteur. La première chose qu'on remarque c'est le travail remarquable sur les décors et les costumes, s'appliquant à montrer le soin apporter à leurs toilettes royales qui crée un paradoxe avec l'austérité qui est brutal (pour eux !) et qui empire au fi du temps. La sobriété est de mise, appuyé par une musique qui instaure un malaise, une sensation désagréable voir même funeste.

Comme l'indique n'encart du début, le film est inspiré librement des mémoires du valet du roi, il y a donc une authenticité certaine mais il est évident que le valet Cléry n'était pas témoin de tout et cela permet au cinéaste de pouvoir imaginer ce qui ne peut être su ou confirmé. C'est là la réussite du film, car historiquement tout est soit vrai soit susceptible de l'avoir été et ce même si certains passages perturbent un tantinet... ATTENTION SPOILERS !... l'évocation du viol est particulièrement malsain à maints égards, d'abord parce qu'il donne une image de la Reine qui serait prête à toutes les humiliations alors qu'on sait qu'elle était fière, courageuse et digne, et surtout rien n'existe, strictement aucune preuve ni même allusion n'existe sur cette éventualité... FIN SPOILERS !... C'est bien la seule "liberté" qui reste gênante. A contrario, le film atténue énormément la scène effroyable de la Princesse de Lamballe, tandis que la découverte de l'armoire de fer est complètement occultée alors même qu'elle est essentielle dans l'évolution du procès. Mais il est vrai que le cinéaste préfère se focaliser sur l'intimité de la famille, l'attente forcément longue, l'ennui qui en découle surtout qui s'accentue au fil du temps, la relation du couple royale qui sonne aussi juste que possible entre un roi qui paraît bon et humain mais qui est surtout naïf et lâche, et sa Reine, plus forte mais aussi sans doute plus réfractaire à une certaine remise en cause. Plus objectivement on aurait aimé un Roi/Canet un peu moins "autiste"et une Reine un peu plus grâcieuse et coquette mais on chipote sans doute sur nos propres fantasmes et/ou nos connaissances. Néanmoins  Gianluca Jodice signe sans doute le film historique le plus précis et réaliste sur ces quelques mois de calvaire et pénitence de la famille royale, à tel point qu'on regrette que le film n'est pas été plus long de 15-20mn pour conclure avec le purgatoire de Marie-Antoinette. Un très beau film à voir.

 

Note :      

 

14/20
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