Tendre et Saignant (2022) de Christopher Thompson
Seulement le second film en tant que réalisateur des années après "Bus Palladium" (2010) pour Christopher Thompson, pourtant connu pour être le petit-fils de Gérard Oury, fils de Danièle Thompson pour qui d'ailleurs il a été scénariste et acteur comme sur "La Bûche" (1999), "Fauteuils d'Orchestre" (2006) et "Le Code a Changé" (2008). Pour ce nouveau projet le cinéaste a voulu une comédie sentimentale où une femme devait évoluer dans un milieu masculin, mais aussi en créant un décalage social, ce qui est en soi une trame archi-connue en témoigne ainsi la caricature de bobo intellectuelle face à un ouvrier boucher. Mais Christopher Thompson avoue aussi un choix idéologique : "Je suis convaincu que dan sce domaine, comme ailleurs, on n'améliore pas les choses en faisant table rase du passé. On élève des animaux et on consomme de la viande depuis des millénaires, cela représente des traditions, des fêtes, de la convivialité, des liens qui, à mon avis, ne doivent pas disparaître. En revanche, il est évident que tout cela doit évoluer. Je suis très sensible au bien être animal et il y a eu des abus insupportables et dangereux dans notre façon de consommer la viande depuis des décennies. L'élevage et l'abattage industriels sont intolérables. Il ne doit pas y avoi de places dans nos commerces et dans nos assiettes pour la consommation de produits issus de telles pratiques". Le réalisateur-scénariste co-signe son scénario avec Fabrice Roger-Lacan auquel on doit le scénario des films comme "Adolphe" (2002) de Benoît Jacquot, "Akoibon" (2005) de Edouard Baer, "À Fond" (2016) de Nicolas Benamou ou le récent "Mon Cousin" (2020) de Jan Kounen... Charly, rédactrice de mode à Paris qui a quitté sa province depuis des années hérite de son père de la boucherie familiale. Sans se poser des questions elle se prévoit de vendre le commerce jusqu'à sa rencontre avec l'employé de son père, Martial, passionné par son travail qui espère bien faire changer d'avis Charly...
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La femme qui hérite est incarnée par Géraldine Pailhas, qui n'est autre aussi que la conjointe et la mère des enfants de Christopher Thompson avec qui elle a joué dans "Didine" (2008) de Vincent Dietschy, mais elle a surtout joué dans des films écrit par son homme avec "Une Vie à t'Attendre" (2004), "Les Héros de la Famille" (2006) et "Les Yeux de sa Mère" (2011) et tous trois de Thierry Klifa, puis évidemment "Bus Palladium", actrice qu'on n'avait pas vu depuis 2017 et jusqu'au tout récent "Tout s'est Bien Passé" (2021) de François Ozon. L'artisan-boucher est interprété par Arnaud Ducret vu dernièrement dans "Mine de Rien" (2020) de Mathias Mlekuz et "Divorce Club" (2020) de et avec Arnaud Ducret, puis retrouve pour l'occasion après "Gaston Lagaffe" (2018) de Pierre-François Martin-Laval sa partenaire Alison Wheeler remarquée dans "Going to Brazil" (2017) de Patrick Mille et vue dans "Forte" (2020) de Katia Lewkowicz. Citons Stephane de Groodt vu récemment dans "Tout nous Sourit" (2020) de Mélissa Drigeard, "Connectés" (2020) de Romuald Boulanger et "Chacun chez Soi" (2020) de Michèle Laroque, Antoine Gouy omniprésent ces derniers mois avec "Comment je suis Devenu Super-Héros" (2021) de Douglas Attal, "Délicieux" (2021) de Eric Besnard et "On est Fait pour s'Etendre" (2021) de et avec Pascal Elbé, Elisa Ruschke vue dans "Rupture pour Tous" (2016) de Eric Capitaine et "Le Dindon" (2019) de Jalil Lespert, Anne le Ny vue dernièrement dans "Stillwater" (2021) de Tom McCarthy, puis enfin Jean-François Stévenin dont c'est un des nombreux rôles posthumes à l'instar du récent "Illusions Perdues" (2021) de Xavier Giannoli... Pour ce film Christopher Thompson a souhaité un réalisme appuyé sur l'univers de la boucherie. Ainsi L'équipe a reçu le soutien comme conseiller technique et formateur de Hugo Desnoyer, artisan-boucher à Paris pour accentuer le réalisme technique, la cheffe décoratrice Julia Lemaire (également responsable sur le tout récent "Ouistreham" de Emmanuel Carrière) a construit une vraie fausse boucherie dans le quartier du Marais à Paris pour mieux maîtriser le décor, le casting a intégré également d'authentiques bouchers allant jusqu'à utiliser l'argot des bouchers, appelé "Louchebem" (Tout avoir ICI !). On salue l'effort pour le réalisme même si le "Louchebem" est sans aucun doute l'apanage d'une caste élitiste et surtout chez les vétérans du secteur ; jamais entendu parler de ça ou comme ça, d'ailleurs les vrais bouchers du film ont dû l'apprendre ! Mais cela rajoute un cachet certe suranné mais cela rappelle la volonté du cinéaste de revenir aux "origines" et ne pas oublie le passé. Le film repose justement dans ce mix entre hommage aux artisans et la Rom Com classique.
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Le côté hommage est parfois un peu appuyé, on sent réellement le propos pro-viandard, surtout et essentiellement le message pour la qualité des produits. Pourquoi pas ?! Même si le message est si limpide que les vegans vont assurément boudés le film au mieux, le critiquer quoi qu'il arrive au pire. Mais niveau divertissement c'est la Comédie sentimentale qui prime. Le film débute avec envie et fantaisie mais repose sur une coïncidence tirée par les cheveux. Heureusement le couple Pailhas/Ducret fonctionne à merveille, au diapason on sent les étincelles et on apprécie que le film évite les écueils habituels et faciles de la différence de classe : par exemple elle n'a pas honte de présenter son père boucher, elle n'est pas timorée quand il faut bosser derrière le comptoir, les collègues ne jouent pas gratuitement de tics ou grimaces ou ne sont pas hautain ou méprisant envers les "pauvres"... etc... des détails mais qui placent le film dans un contexte plus modernes et réalistes que la plupart des autres comédies qui surjouent les différences et/ou les réactions caricaturales. Ce sont là les vrais bons points du film. Par là même les relations "conjugales" "extra-conjugales" façonnent une relation très contemporaine voir mature comparée aux paramètres récurrents du genre où la jalousie est systématiquement hystérique ou incontrôlée. Par contre, le film repose trop sur le charme du duo, il manque des gags plus inspirés, voir même plus présents et on peut trouver les seconds rôles trop peu exploités, ils sont de simples faire-valoir. Christopher Thompson se sert et sert à merveille sa magnifique femme Géraldine Pailhas, Arnaud Ducret est idéal et ne cabotine pas, le charme opère, le message "culinaire" passe mais il manque plus d'effet gag, plus de séquence clef. Néanmoins un passe un bon moment à défaut de marquer les esprits.
Note :