Sentinelle Sud (2022) de Mathieu Gerault
Un retour inattendu et sans doute inespéré pour le réalisateur-scénariste Mathieu Gerault avec ce nouveau film qui s'avère être son premier long métrage à avoir droit à une sortie en salles après de nombreuses années après son court métrage "Hautes Herbes" (2001) et surtout son film "Journal IV" (2005). Le cinéaste avoue : "Quand j'étais enfant, j'ai été séparé de mes jeunes frères. Le retour du soldat avec sa mythologie, était idéal pour aborder ces questions..." à savoir la fraternité en précisant vouloir mélanger deux genres, le Film Noir et la chronique politico-sociale : "Autant de figures, d'envies de cinéma, qui me permettaient d'exprimer la quête affective de Christian et sa dimension tragique." Le cinéaste avoue s'être particulièrement inspiré du cinéma de Sidney Lumet, grand réalisateur de quelques classiques comme "Serpico" (1973) ou "Un Après-Midi de Chien" (1975). Mathieu Gerault co-signe son scénario avec deux compères expérimentés, Nicolas Silhol réalisateur-scénariste du film "Corporate" (2017), puis Noé Debré co-scénariste entre autre de "Les Cowboys" (2015) de Thomas Bidegain, "Dheepan" (2015) de Jacques Audiard et plus récemment "Stillwater" (20221) de Tom McCarthy...
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Militaire, Christian Lafayette fait retour en France métropolitaine après avoir participé à une opération secrète tragique. Alors qu'il tente de retrouver une vie normale et se réadapter à un quotidien moins guerrier il est mêlé à une sombre affaire de stupéfiants en tentant de venir en aide à deux frères d'armes. C'est le début d'un engrenage qui va mener à une issue dont il ne pouvait se douter... Le rôle principal est incarné par Niels Schneider vu dernièrement dans "Curiosa" (2019) de Lou Jeunet, "Sybil" (2019) de Justine Triet ou "Les Choses qu'on Dit, les Choses qu'on Fait" (2020) de Emmanuel Mouret, et qui après "Un Peuple et son Roi" (2018) de Pierre Schoeller retrouve son partenaire et "supérieur" Denis Lavant vu récemment dans "La Nuit des Rois" (2020) de Philippe Lacôte et "Tralala" (2021) des frères Larrieu. Les deux autres rôles importants sont tenus par Sofian Khammes vu récemment dans "La Nuée" (2021) de Just Philippot et "Enquête sur un Scandale d'Etat" (2022) de Thierry De Peretti, et retrouve après "Poissonsexe" (2020) de Olivier Babinet sa partenaire India Hair vue récemment dans "Une Jeune Fille qui Va Bien" (2021) de Sandrine Kiberlain et "En Même Temps" (2022) du duo grolandais Gustave Kervern-Benoît Delépine. Citons ensuite Marc Prin vu notamment dans "Demain Dès l'Aube" (2008) de Denis Dercourt, "Les Fantômes d'Ismaël" (2017) de Arnaud Desplechin et "Albatros" (2021) de Xavier Beauvois, puis retrouve après "Coup de Chaud" (2015) de Raphaël Jacoulot son partenaire David Ayala vu récemment dans "Kaamelott : Premier Volet" (2021) de et avec Alexandre Astier, et enfin l'actrice Saadia Bentaïebb vue dans "Jusqu'à la garde" (2017) de Xavier Legrand et "Tromperie" (2022) de Arnaud Desplechin... Le film promettait un thriller musclé où des soldats revenus au pays se retrouvent dans une grosse embrouille dans le trafic de stupéfiants, mais heureuse surprise il n'en est rien ou plutôt le film s'avère plus malin et plus profond que ça. En effet, si il y a bien une intrigue sur les stups on peut dire qu'il s'agit presque d'un Macguffin à la Hitchcock ; à savoir que c'est un prétexte pour mieux nous emmener ailleurs.
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En effet, le vrai sujet reste la réinsertion des soldats et les syndrômes post-traumatiques. Les soldats ne reviennent pas indemnes, d'autant plus quand leur dernière mission a été un gâchis humain et à priori tactique. C'est le vrai bon point du film, dans sa thématique de fond mais aussi dans sa façon de traiter la question avec des personnages psychologiquement parfaitement écrits. Evidemment, il y a bien une intrigue derrière, mais plus que le trafic de drogue il est aussi question de géo-politique. Sur ce point, si c'est aussi très intéressant et qui donne de l'épaisseur au film on aurait aimé que ce point soit sans doute plus exploité vis à vis de dealers gitans. Un petit détail pour un petit bémol. Niveau action il n'y a que deux scènes, marquantes et aussi nécessaires et suffisantes mais on aurait aimé un réalisme plus pregnant (par exemple un militaire expérimenté qui râte sa cible à seulement 10m ?!), par contre on salue le choix de ne pas utiliser les flash-backs sur les scènes de guerre. Trop de réalisateurs usent de ce système souvent plus gratuit qu'utile. Le hors-champs sert aussi l'inexplicable. Mathieu Gerault signe un drame plus qu'un thriller et c'est là sa réussite, un choix judicieux. Un premier film intelligent et prenant malgré ses maladresses avec en prime un casting hétéroclyte au diapason. Un bon moment.
Note :